Interview d’Emmanuel Fontaine : 3ème des Championnats de France 2011 de 24h. Il nous explique comment réussir votre course de 24h


L’interview au format audio :

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L’ interview au format vidéo :

COURSE FONTAINE ANNE CECILE EMMANUEL EQUIPE DE FRANCE

Vous pouvez retrouver Emmanuel Fontaine sur :

-Son blog Anne Cécile et Emmanuel Fontaine 

-Son palmarès en course à pied en cliquant ici

Transcription texte de l’interview audio d’Emmanuel Fontaine :

Maxence Rigottier : Bonjour à Tous, c’est Maxence Rigottier de blog course à pied. Aujourd’hui, je suis avec Emmanuel Fontaine qui est un spécialiste des 24h. Tu as été 3ème des championnats de France de 24 heures à Séné. Tu as également une performance de 254,762 km sur 24h. C’est quand même vraiment brillant et ce sont de très bons résultats. Je vais te laisser te présenter pour que tu nous expliques un petit peu ton parcours de course à pied depuis tes débuts jusqu’à aujourd’hui, et que tu nous explique comment tu es arrivé à atteindre de telles performances. Bonjour Emmanuel.

Emmanuel Fontaine : Bonjour Maxence, bonjour à tous. Emmanuel Fontaine, j’ai 43 ans, je pratique effectivement la course à pied longue distance depuis de très nombreuses années. J’ai commencé en 1985, je n’avais pas 17 ans et je voulais participer aux 100 km de Millau pour une 1ère expérience. Ça s’est arrêté au bout de 70 bornes, je ne pouvais plus marcher pendant 3 semaines derrière, mais l’année suivante, j’ai de nouveau tenté cette affaire-là et j’ai pu clôturer mon 1er 100 km en 1986, dans un temps, aux environs des 13h50. C’était assez long, mais c’était le début d’une histoire de course à pied longue distance. Je n’avais jamais pratiqué l’athlétisme auparavant. C’était la course de l’année, c’étaient les 100 km de Millau. J’ai fait ça de 1986 à 1991, l’année du championnat de France, où chaque année j’améliorais mon chrono et je suis arrivé en 1991 à 8h53. Les championnats de France avaient lieu à Millau cette année-là. En 1992, j’ai eu un grave accident de parapente qui m’a fait mettre un terme à tout cela (fracture, tassement d’une vertèbre lombaire). J’ai été opéré. Cet aspect-là m’a permis de rencontrer Anne Cécile. Mon accident m’a autorisé une rencontre avec Anne Cécile qui était kiné au centre de rééducation où j’étais soigné. Notre histoire de vie de couple a commencé comme ça. Pour le reste, après, j’ai repris la course à pied avec Anne Cécile justement. En 1996, je lui ai dit que ce serait bien qu’elle essaye Millau, et elle s’est entrainé 5-6 mois, et on a fait notre 1er Millau ensemble. Je crois qu’on a du boucler ça en 11h17, donc de suite pour Anne Cécile manifestement des prédispositions intéressantes. Pour ce qui est du 24h, c’est arrivé plus tard. En 2006 pour moi. Ma 1ère expérience a été à Plouvorn, en Bretagne, en août 2006, où je réalise 192 km, et je me suis dit que ce n’était pas si mal que ça pour une 1ère fois, que ce serait bien d’essayer d’aller chercher la barre des 200 la prochaine fois. J’ai essayé ça en 2007, mais je me casse plusieurs fois les dents, à savoir que je n’y arrive pas. Je n’y arrive pas, alors je tente différentes façons de commencer ma course, plus doucement, très doucement, plus vite avec des temps de pause très longs. A chaque fois, je calais, je ne comprenais pas, je n’y arrivais pas. J’ai incité Anne Cécile à se mettre aux 24h en 2006 parce que j’avais vu les résultats des filles qui étaient parties aux championnats du Monde, et je lui ai dit que ça vaudrait peut-être le coup qu’elle le tente parce que manifestement ça pouvait le faire. Elle a fait sa 1ère expérience en 2006, où elle réaliser 187 km. L’année suivante 189, je crois. En 2008, elle n’était toujours pas licenciée et je lui ai dit de prendre une licence et d’aller faire les championnats de France parce que ce serait peut-être bien, et que la dernière fille qui était partie l’année précédente au Canada avait 182 km. Et Anne Cécile qui s’entrainait normalement, comme moi, ni plus ni moins, a réalisé 216 km au mois de mai 2008. Elle a ainsi gagné sa sélection pour les championnats du Monde de Séoul, en entrant en équipe de France. Là, je l’ai préparé, et au mois d’octobre, elle se retrouve vice-championne du monde, à moins de 400 m d’Anne-Marie Vernet, juste derrière la 3ème place de Brigitte, donc vice-championne du monde en individuel et championne du monde par équipe, avec une marque proche des 240 km. Et là je me suis dit, je vois comment Anne Cécile s’entraine, je pense que je n’ai pas les mêmes prédispositions, mais je dois être capable de faire aussi bien. Et je tente, je continue malgré mes échecs successifs, à tenter d’atteindre cette fameuse barre des 200. Ça se produit en novembre 2008, aux 24h d’Aulnat où je termine 2ème derrière Bruno Heubi, à 228 km. Ensuite, en 2009, j’arrive à avoir exceptionnellement un dossard pour la course open des championnats du monde à Bergame, là où Anne Cécile était en équipe de France. Et en open, j’arrive malgré une course pas très bien gérée, à améliorer légèrement ma marque, puisque je suis presque à 229, mais surtout, je termine 12ème de ces championnats du Monde. Donc classé, parce que j’étais en open, mais j’ai fini quand même 12ème au scratch. Ça m’a produit un déclic, en me disant que finalement les portes de l’équipe de France étaient peut-être accessibles pour moi aussi, alors que je n’aurais pas misé un kopek quelques années auparavant. Pour avoir la sélection pour les championnats du Monde de 2010, il fallait aller chercher une barre supérieure à 240, et c’est ce que j’arrive à faire aux 24h de Monaco en novembre 2009, où j’ai fait 243 km. J’ai remporté ainsi mon ticket pour participer aux championnats du Monde de 2010, et cette fois ci en équipe de France, dans l’équipe nationale. J’ai bien préparé ces championnats du Monde, j’ai fait une marque à 246 km à Brive, dans une ambiance exceptionnelle car c’était en France, il y avait un bon groupe. Que des bonnes choses, des bons moments de sport, des bons moments de vie partagés avec les uns et les autres, et puis c’était en France, nos enfants étaient là, mes parents, mes frères, mes belles-sœurs, enfin pas mal de proches, beaucoup d’amis, donc c’était vraiment très sympa. Voilà pour 2010. 2011, nouvelle sélection, hélas, pas de championnats du monde cette année-là, à cause de l’annulation de la ville qui était susceptible de les organiser. Donc je m’oriente, en accord avec Jean-François Pontier, qui était devenu mon entraineur depuis 2009, à participer aux championnats de France de Séné, où je termine 3ème, à une marque supérieure à 250 km. Donc là, ça commence à être des marques vraiment intéressantes. Je suis pleinement satisfait de cette course, même si ça ne s’est pas super bien passé. J’ai failli abandonner au bout de 8 heures, et puis l’un dans l’autre, avec l’aide des coachs, l’aide des gens autour, j’ai réussi à repartir et à faire une bonne fin de course. Pour finir sur le 24h, j’ai eu la chance d’être invité à Taipei en décembre 2011, pour faire un 24h sur piste, aux côtés de grands noms du 24h, Ryoichi Sekiya, qui est le quadruple champion du Monde, ainsi que Mami Kudo, qui est la double recordman du Monde parce qu’elle a les 2 derniers records à son actif. Et là, je termine 3ème de cette épreuve, derrière ces deux athlètes d’exception, avec une marque, comme tu l’as dit tout à l’heure de 254,762 km. Alors c’est assez précis, mais sur piste, ce n’est pas très compliqué car les marques sont très précises sur 24h.

Maxence Rigottier : D’accord. Exactement. Excellent parcours que tu viens de nous dévoiler. Tu as eu de nombreux échecs, ce qui est normal, pour atteindre le succès. Comment as-tu fait pour ne jamais abandonner ? Il y a beaucoup de coureurs qui abandonnent chaque année la course à pied, comme dans toute activité. Comment as-tu fait pour ne jamais abandonner ? Explique-nous un petit peu tout cela.

Emmanuel Fontaine : Oui, alors ça c’est assez difficile à expliquer, mais je pense que la raison essentielle c’est qu’on partage cette discipline avec Anne Cécile. On ne fait pas forcément beaucoup d’entrainements en commun, parce qu’on a pas forcément les mêmes allures de travail, mais on essaye de temps en temps. Elle avait réussi. Elle m’a ouvert la voie. Ses résultats m’ont fait prendre conscience que je devais être capable d’arriver à autre chose.

Maxence Rigottier : D’accord.

Emmanuel Fontaine : Je pense que ça s’est fait comme ça. C’est sûr que le fait d’améliorer sa marque 6 fois de suite sur 24h, pour l’instant ça incite à continuer, même si je suis conscient aussi que ça ne sera pas éternel. Les marques sont vraiment… On peut toujours faire mieux, c’est évident. Mais là, ça commence à être difficile d’améliorer ce genre de performance.

Maxence Rigottier : D’accord. Et qu’aimes-tu dans le simple fait de courir et pourquoi cours-tu ? Pour ton développement personnel ? Pour le plaisir ? Pour la compétition ? Pour le chronomètre ? Qu’aimes-tu dans le simple fait de courir ?

Emmanuel Fontaine : Il y a un peu de tout ça, à savoir que c’est vrai que j’ai été judoka pendant de très nombreuses années. J’aimais la compétition. Ça n’a rien à voir avec la course à pied, mais j’ai cet esprit de compèt depuis que je suis tout petit. Il y a l’esprit de compèt, c’est sûr, il y a aussi du plaisir. Quand je rentre d’une journée de travail où j’ai mes 28 élèves, et que ce jour-là ils ont été un peu difficiles, cette petite heure que je vais m’octroyer le soir après ma journée, pour aller passer une heure, même sans forcément avoir une séance mais un simple footing, des fois ça ressource pleinement. Il y a ce plaisir là aussi, comme je le disais, et le plaisir d’améliorer le chrono ou des marques. Et puis, c’est vrai que je me considère comme un coureur lambda des pelotons. D’être arrivé à atteindre ce niveau-là, d’être entré en équipe nationale, d’avoir un partenaire pour nous aider un petit peu dans cette pratique, plus ces partages avec les gens de mon club, avec l’entraineur, avec Anne Cécile, avec toute la communauté des gens qui parcourent la longue distances parce que c’est une grande famille, ça m’incite pour l’instant à continuer. Par contre, je pense que le haut niveau aura prochainement un terme. Ça demande trop d’implications, trop d’investissements. Ça devient, à la longue, difficile de tout concilier.

Maxence Rigottier : Oui, parce que pour courir de telles distances, tu as des entrainements très poussés. Il faut une immense organisation. Peux-tu nous raconter une semaine type des entrainements pour un coureur de 24h pour pouvoir atteindre tes performances ? Quels sont tes types d’entrainement pour une semaine type à peu près ?

Emmanuel Fontaine : ça dépend un peu de la période de là où on se trouve par rapport à la compétition. Il y a toujours une phase de préparation où il faut déjà un petit peu perdre « les kilos superflus » post compétition. En ce qui me concerne, il y a toujours une certaine retenue par rapport à l’alimentation, surtout avant les compétitions où je suis obligé de faire un peu plus attention, même si le kilométrage facilite cette atteinte du poids de forme. Il y a toujours une petite frustration que je compense systématiquement après les courses. Ça commence par-là, donc faire du volume, mais pas non plus à outrance, parce que de toute façon je n’ai pas un corps qui encaisserait beaucoup trop de kilomètres non plus. Après, plus on s’approche de l’échéance de la compétition, plus le volume va être important, la qualité aussi. La semaine type, c’est assez difficile à dire, mais en phase finale de préparation, ça va être entre 7 et 10 séances hebdo, et pour atteindre des kilométrages à 150-160 km.

Maxence Rigottier : D’accord. Donc entre 20 et 25 km par jour en moyenne.

Emmanuel Fontaine : Oui, à peu près, mais en fait ça veut pas dire grand-chose 20-25 km, parce qu’il y a des jours où ça va être 12 km, il y aura peut-être un repos dans la semaine, mais par contre, le samedi ou le dimanche, dans le week-end, il y aura peut-être une grosse sortie de 5 heures le samedi, et le dimanche il y aura une autre sortie, plus cool, mais de 2 heures seulement. C’est assez aléatoire. Je pense que le meilleur moyen de voir ce qu’on fait, c’est d’aller sur notre blog.

Maxence Rigottier : Exactement.

Emmanuel Fontaine : C’est difficile de le dire exactement. Tout en sachant, quand même, qu’il y aura beaucoup de séances spécifiques 24h. Ce n’est pas compliqué, on a un petit circuit autour de la maison, on prépare les bouteilles et puis c’est parti à deux à 5, voire 6 heures, voire 7 heures de tour autour de la maison. Le tour fait 2km400, 2km500, ça dépend du circuit. Les ravitaillements sont prêts, on prend la bouteille, on marche 100 m et on part.

Maxence Rigottier : Exactement. J’invite toutes les personnes, à la suite de cette interview, d’aller voir votre blog annececileemmanuelfontaine.blogspot où tu indiques tous tes entrainements, les récits de tes courses, etc. C’est vraiment intéressant si un jour vous voulez vous lancer dans ce type de compétition. Egalement, tu cours environ 150 km ou plus par semaine.

Emmanuel Fontaine : ça c’est quand même vraiment quand je suis en phase de préparation, sinon, je suis plutôt à 80-100 km maxi.

Maxence Rigottier : D’accord. Et du coup, comment fais-tu pour garder cette motivation au quotidien, pour pouvoir tous les jours courir ? Parce que je suppose qu’il y a certaines fois où tu as peut être des impératifs extérieurs à faire, ou tu as moins de motivation. Comment fais-tu pour toujours tenir cette régularité ?

Emmanuel Fontaine : Il n’y a pas le choix. Si pardon, c’est une mauvaise phrase que je dis. On a le choix. Mais à partir du moment où on s’implique dans le haut niveau, je dis haut niveau c’est en terme de performances en tout cas, ça sous-entend qu’il faut faire des efforts et parfois des sacrifices, et là, c’est un choix. C’est-à-dire que personne ne m’impose d’aller courir. Je le veux bien. C’est vrai que si, des fois c’est difficile. On aimerait aussi faire autre chose que de la course à pied. Mais à partir du moment où je prends des engagements, j’essaye d’y répondre favorablement. Et quand je m’aligne sur un 24h, dans l’objectif de faire une performance, j’essaye de ne pas m’y rendre comme un fanfaron, en ayant juste à l’idée de fanfaronner. Je me prépare sérieusement, j’aspire à atteindre un objectif, même si malheureusement sur un 24h ce n’est jamais acquis d’avance, et que l’entrainement ne fais pas tout.

Maxence Rigottier : Oui c’est sûr, puisqu’à chaque course, tu as l’inconnu qui est soit la distance, soit le temps, parce que même si on est bien entrainé, on peut très bien abandonner parce que 24h c’est quand même assez long.

Emmanuel Fontaine : Tout à fait. Après, il y a une part de mental qui intervient énormément sur le 24h, et je pense aussi une grosse part d’expérience. Au jour d’aujourd’hui, je pense qu’on a fait, je ne dirais pas qu’on a fait le tour, mais disons qu’on a progressé dans différents domaines, dans la gestion de course, la gestion du ravitaillement, les allures… plus les expériences qui favorisent cet aspect mental. Si je l’ai fait, pourquoi je ne pourrais pas le réitérer. Tout en sachant que, malheureusement, ça ne marche pas à tous les coups.

Maxence Rigottier : J’imagine. Et pour toi, quel est la part de mental dans ce type de distance ?

Emmanuel Fontaine : Difficile à quantifier. Je dis vraiment difficile à quantifier, comme je disais tout à l’heure, au bout de 8 heures l’année dernière à Séné j’étais à deux doigts d’abandonner, je m’arrête devant la table de Jean-François, mon entraineur, je lui dit que j’arrête, que je suis désolé mais que j’arrête. Il arrive à me rebooster, et finalement, je suis allé chercher une marque à plus de 250 km, donc c’est très difficile à quantifier. Il y a des courses qui vont se passer plus ou moins bien. Pour moi, sur tous les 24h auxquels j’ai participé, j’ai eu 2 courses qui se sont passées merveilleusement bien, c’est-à-dire quasiment pas dans la souffrance, c’était Monaco en 2009 et Taipei en 2011. Ça, malheureusement, on aimerait que ça se reproduise à chaque 24h, mais ce n’est pas possible. Il y a forcément un moment où on va piocher, un moment où ça va être vraiment dans le dur, et là il faut prendre sur soi, il faut essayer de positiver tout ça, et notamment se remémorer tous les sacrifices et entrainements au quotidien pour justement être présent là, et il faut retrouver l’énergie, l’énergie mentale. Parce que c’est une grosse part, le travail a été fait à l’entrainement, donc à partir de là, c’est vrai qu’il y a un aspect mental important, mais il est difficile à quantifier.

Maxence Rigottier : Exactement. Et que t’est-il passé par la tête quand tu souhaitais abandonner et que tu es allé quand même jusqu’au bout ? Que ressentais-tu comme sensations ? Qu’avais-tu comme pensée qui t’a incité à abandonner, mais pourtant tu as continué pour aller jusqu’au bout de l’effort ?

Emmanuel Fontaine : Si tu ne te sens pas bien si tu veux. Là, je vois pour Séné, aux championnats de France en 2011, je n’étais pas très bien, au bout de 8 heures je commence à avoir quelques petits étourdissements, je me suis dit qu’il m’en restait encore 16, je n’étais pas bien, il faisait très chaud. Je ne sais pas, c’est difficile, il y a des passages comme ça. Il faut savoir que sur 24h, un des principes d’Anne Cécile, c’est de se dire que tant qu’on peut mettre un pied devant l’autre, on continue. Je crois que c’est une part de vérité, c’est-à-dire qu’à partir du moment où physiquement tu peux au moins marcher, alors il faut continuer parce que de toute façon, à un moment ou à un autre, tu vas repartir en courant, c’est une certitude. S’il n’y a pas de gros soucis mécaniques, il ne faut surtout pas se dire qu’on est fatigué et qu’on arrête. C’est une erreur je pense. Ce qui m’a fait repartir à Séné, par exemple, c’est un coup de fil, tout simplement. Ça n’allait pas bien, Jef m’a passé Anne Cécile au téléphone qui était restée sur Montpellier, et puis voilà, elle ne me lâche pas. Il y avait Jean-François Pontier qui m’a bien boosté, Bruno Heubi qui était là, des gens que je connais, que j’apprécie, qui étaient présents autour du circuit, et puis c’est reparti. Ensuite, on mentalise comme je dis. A ce moment-là il faut lisser l’effort, ne plus trop réfléchir.

Maxence Rigottier : D’accord. L’idéal est de toujours essayer de positiver. Forcément, vous allez avoir des jours sans, des jours avec. Egalement, dès qu’on souffre un petit peu, le mental est très habile pour se remémorer les pensées négatives. Il faut absolument, comme tu l’as souligné juste avant, repenser tous les efforts que l’on a fait, les bons moments, et tant qu’on peut mettre un pied devant l’autre, il faut aller jusqu’au bout. Parce que je pense que si on abandonne assez souvent, je ne sais pas les distances comme les 24h, mais il faut essayer de ne pas trop habituer son esprit et son corps à abandonner, parce que malheureusement, dès qu’on va avoir un petit moment de souffrance, il y a de grandes chances qu’on repense à cet abandon.

Emmanuel Fontaine : Oui, et puis c’est la solution facile.

Maxence Rigottier : Voilà.

Emmanuel Fontaine : Il est plus facile de remettre le clignotant que de remettre le couvert.

Maxence Rigottier : Exactement. C’est exactement ça. Et quelle est ton alimentation par rapport à ce type de compétition ? Peux-tu nous évoquer ce que tu prends ? Je suppose qu’il y a des compléments alimentaires… Comment fais-tu pour toujours avoir la pêche et surtout, ne pas avoir de crampes, des choses comme ça, pour pouvoir enchainer au quotidien les entrainements et pour pouvoir réaliser toutes ces compétitions ?

Emmanuel Fontaine : Au niveau alimentation, je bénéficie depuis quelques mois des services d’un diététicien, Nicolas Aubineau, qui est le diététicien de Nutratletic. Jusqu’à présent, je me gérais tout seul par rapport à ça, comme je l’ai dit, je suis quand même un gros mangeur, donc il y a forcément un moment où dans la période de préparation il y a une part de restriction, mais il n’y a pas de soucis particuliers, j’ai cette chance-là, je n’ai pas de souci particulier. Après, c’est vrai qu’on fait quand même relativement attention à ce que l’on mange. Pas trop de graisses ou de mauvaises graisses en tout cas. Pas franchement d’alcool ou très peu. Il y a des produits comme ça, à partir du moment où on vise des résultats, qu’il faut éliminer. Il ne faut pas non plus être frustré. Je sais que j’ai une certaine addiction au Nutella, et je suis obligé, c’est comme ça. Pour ce qui est des compléments alimentaires, j’en prends très peu. Je prends un peu de fer en ce moment parce que j’avais une petite baisse de ce côté-là, mais pas plus. Ce qui est important, ce n’est pas tant ce qui nous fragilise, peut-être faire un bon entrainement, quand je dis fragilise, c’est l’aspect physiologique du corps, peut-être un peu les volumes d’entrainement, mais ce qui vraiment nous détruit, ce serait plus les courses, parce que quand vous courez 24h non-stop, l’organisme, à la base, n’est pas fait pour ça. Donc là, on va vraiment piocher un peu au fond de soi et il faut savoir vraiment prendre le temps de bien récupérer. C’est indispensable pour refaire les niveaux, dans tous les secteurs. Après, en course, comme je le disais tout à l’heure, on a réussi à mettre en place avec Jean-François, au fil des courses, une meilleure gestion de ce côté-là, côté hydratation. Je vois par exemple mes 24h de Taipei, j’ai bu 28 litres sur 24 heures.

Maxence Rigottier : 28 litres d’eau avec des compléments ?

Emmanuel Fontaine : Oui, 28 litres de boissons essentiellement. Des boissons énergétiques Nutratletic, du Nutraperf, du Nutrarecup, de la Saint Yorre, du Coca. J’ai tourné à ça pendant 24 heures. Ça fait aussi de nombreuses pauses d’arrêts pipi, mais c’est indispensable pour apporter l’énergie au corps, pour lui permettre de continuer à avancer.

Maxence Rigottier : D’accord. Et niveau alimentation, tu manges quand même quelque chose de solide je suppose, parce que c’est impossible de …

Emmanuel Fontaine : Pendant la pause. Très peu, très très peu. Déjà, pour ce qui est des boissons énergétiques, elles ont été étudiées pour justement complémenter un petit peu tout ça. Ensuite, il faut savoir que j’ai quand même des difficultés à mastiquer, à ingérer des aliments solides, donc à part la banane, je ne prends pas grand-chose.

Maxence Rigottier : D’accord. Pas de pâtes de fruits, du pain d’épices…

Emmanuel Fontaine : Un tout petit peu de barres énergétiques, mais ça reste quand même difficile à ingérer, donc dans la mesure où j’arrive à complémenter au niveau des apports énergétiques avec les boissons, pour moi il n’est pas indispensable de manger solide. Pour quelqu’un qui prend plus le temps de s’arrêter, lui, peut-être, aura la possibilité de boire des soupes, de manger des purées, des pâtes… Moi c’est très très peu parce que j’ai du mal à les avaler tout simplement.

Maxence Rigottier : J’imagine. En tout cas, tu as donné encore un nouvel aperçu de l’alimentation et surtout, ce qui est quand même incroyable, 28 litres pour un 24h, mais ce qui est logique parce que vu l’effort intense, plus de 254 km, du coup, tu as besoin énormément t’hydrater pour ne pas tomber. Et pour finir sur une dernière question, quel message pourrais-tu donner à toutes les personnes qui aimeraient débuter la course à pied, mais qui se disent « oui mais moi je suis trop nul, je ne sais pas courir, je suis un escargot » ? Quel conseil, quel message souhaiterais-tu leur faire passer pour que ces personnes-là enlèvent leurs barrières mentales et souhaitent se lancer dès demain dans la course à pied ?

Emmanuel Fontaine : Tu induis la réponse dans ta question, à savoir qu’on dit bien une barrière mentale. La priorité c’est d’y prendre du plaisir, de ne pas se sous-estimer, commencer à courir, même des petites distances, alterner marche/course, dès le départ s’il le faut. Ce n’est pas bien grave. Sans vouloir de suite atteindre des chronos. Je pense que l’erreur est là pour beaucoup de gens, c’est vouloir de suite atteindre des chronos. Non, d’abord on prend du plaisir à courir, on augmente la distance, quitte à ralentir d’avantage, et plus ça va aller, plus on va être dans la facilité, et à ce moment-là, on va rallonger la distance, on pourra envisager petit à petit d’améliorer le chrono, si chrono il y a. Le but avant tout est de se faire plaisir.

Maxence Rigottier : Exactement, comme tout le monde. Tout le monde a eu un niveau assez faible au départ. Ne croyez pas que vous êtes le seul dans ce cas de figure. Egalement, avec la magie de la course à pied, la communauté est tellement immense que quelque soit votre niveau, vous allez forcément trouver des gens qui vous correspondent et qui auront un niveau identique au votre.

Emmanuel Fontaine : Oui, puis les coureurs de niveaux supérieurs peuvent très bien s’adapter à des niveaux inférieurs. Ce n’est pas parce qu’on a une VMA à 19, ou 20 km/h, qu’on ne peut pas courir à 11 ou 12. C’est une grossière erreur. J’ai du plaisir de temps en temps à partager des entrainements avec des gens de niveaux inférieurs ou à partager des courses avec des gens de niveaux inférieurs. Je me régale aussi tout autant qu’eux. Ça me fait plaisir de les accompagner, ça me fait plaisir de leur donner le tempo. Et puis inversement, il ne faut pas se leurrer. Il y a des gens bien meilleurs que moi aussi. J’aime à dire que je suis un champion du monde de mon jardin. Ça s’arrête là. Un coureur du dimanche qui a réussi à faire des résultats. Ça s’arrête là. Au départ, je suis un peu monsieur tout le monde aussi.

Maxence Rigottier : D’accord. Merci pour cette interview très enrichissante. J’invite toutes les personnes, une nouvelle fois, qui souhaiteraient te retrouver ou également retrouver Anne-Cécile sur votre blog annececileemmanuelfontaine.blogspot où tu évoques un petit peu tout ton tracé, ton quotidien de coureur de 24h.

Emmanuel Fontaine : Ce blog a été mis en place à la demande un petit peu de Nutratletic. Ils nous avaient incités à faire ça pour communiquer. Et c’est vrai que ce n’est pas mal parce qu’on a rien à cacher. On a beau être en équipe de France, on a pas de secrets, pas de recette miracle, donc rien à cacher. C’est un lieu de partage, de nos expériences, de notre façon d’aborder le 24h. À la limite, il n’y a pas que le récit de mes courses, il y a aussi des récits de course quand je vais me rendre sur des courses pour accompagner des amis, des gens que je connais, que je côtois et avec qui j’ai envie de partager ça.

Maxence Rigottier : Exactement. En tout cas, c’est une bonne initiative de partager ton expérience pour pouvoir aider les autres et surtout faire avancer tout le monde dans le même sens dans la course.

Emmanuel Fontaine : Tout est dit Maxence. Merci.

Maxence Rigottier : Merci une nouvelle fois et je te dis à bientôt, et merci pour cette interview.

Emmanuel Fontaine : Au plaisir de te rencontrer de vive voix une prochaine fois. Au revoir.

Maxence Rigottier : Il n’y a pas de soucis. Au revoir.

Maxence Rigottier : J’espère que cette interview vous a plu. Partagez-la sur Facebook ou sur Twitter. Egalement, dites-moi dans les commentaires ce que vous avez pensé de cette interview, j’espère qu’elle vous aidera à progresser et à vraiment atteindre tous vos objectifs dans la course à pied. C’était Maxence Rigottier de blog course à pied. A bientôt pour de nouvelles vidéos et pour de nouvelles interviews d’athlètes.

Maxence Rigottier

Maxence Rigottier

3 Commentaires

  •    Répondre

    Quelques tuyaux pour mener à bien l'objectif de dans … 17 jours !
    Le parcours "d'un champion du monde de son jardin"… plus de 254km en 24h !!!!!!!!!!

  •    Répondre

    Quoi dire???

    Pour moi, ces courses de 100 km ou de 24 h, c’est juste la cinquième dimension, un univers inaccessible. Je suis à la fois assez affolé de voir ça et complètement admiratif.
    De toute façon, ce n’est pas à 50 balais que je vais me lancer là-dedans ^^ donc je regarde et j’applaudis…

    @+++

    PS: tu en connais beaucoup de ces champions? :)

    • Salut Stéphane,

      Je te rassure, même si j’adore courir, je suis affolé encore par ce type
      de distance. Il n’y a pas que toi, ne t’inquiète pas.

      Je suis impressionné par leur mental…

      Oui, il y aura encore plein d’autres interviews de Champion
      dans les semaines à venir. Patience et à très vite. ;)

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